Je reprends in extenso le propos de mon camarade Eric Lafond et comme ma réponse est bien sûr trop longue pour n’être qu’un post sur facebook, je livre mes premières réflexions sur mon blog.
« Quand le “macronisme” se coupe des modérés
En 2016, François Bayrou faisait l’éloge de la modération. “La modération est une réponse à la crise. Une crise se caractérise par une perte d’équilibre. (…). Soit vous accroissez le déséquilibre en dressant les gens les uns contre les autres, en ciblant telle ou telle catégorie, en cherchant des causes extérieures à la situation qui est la vôtre. Soit vous cherchez à reconstruire un équilibre.” La modération est souvent perçue, en politique, comme une faiblesse, une hésitation. Hier, elle aurait été une force et une preuve de sérénité sur l’essentiel en politique et en démocratie.
La 1ere Ministre avait été nommée pour construire et mener des majorités de projets. Force est de constater que sur la volonté de réformer le système de retraite, elle n’a pas réussi. Le Président de la République aurait dû lui demander sa démission. Tel est l’esprit d’un régime démocratique et de la Ve République. Le Président est en effet, en premier lieu, le garant de la Constitution et du bon fonctionnement des Institutions. En acceptant que le gouvernement utilise l’article 49–3 de la Constitution, le Président sort de la position d’arbitre dans lequel notre régime politique l’a placé. Et ce faisant, il met celui-ci en péril.
Aucun échec n’est rédhibitoire en politique. A l’inverse, refuser d’entériner celui-ci au nom d’une réforme dont le caractère nécessaire n’est en rien démontré, le Chef de l’Etat fragilise également la démocratie. A fortiori dans un contexte de défiance constante et croissante dans les mérites de celle-ci.
Qu’il eut été sage de renoncer à passer en force. Et de cette modération, il est probable qu’une majorité de nos concitoyens aurait été gré au Président de la République. Bien plus que ceux qui auraient revendiqué une victoire politique sans avoir jamais proposé de solutions crédibles pour réformer le système des retraites.
A l’inverse, faute de modération, le Président de la République, et ceux qui se targuent de le suivre, se coupent des modérés. Une fois encore diront ceux qui se rappellent du douloureux épisode de la loi votée (puis censurée) visant à réduire la liberté individuelle de manifester. Une fois de trop, c’est certain. »
Eric Lafond ce 24 mars sur facebook.
Le passage en force est souvent le signe d'une assise d'un pouvoir contesté amenant souvent à des dictatures même molles ou douces !
La façon dont le gouvernement a abordé cette réforme à pas forcés sans passer par des éléments simples et justes de compréhension des enjeux et de la volonté niée par personne du respect du principe de répartition (tel que défini par Pierre Laroque président du Conseil National de la Résistance : les actifs assurent par leurs cotisations à leurs anciens une retraite décente pour permettre de vivre : solidarité intergénérationnelle s'il en est !) montre à quel point ce gouvernement se passe de la confrontation des idées et de la nécessaire concertation entre tous les intéressés et en particulier ceux du monde du travail.
Il eût été bien tant ce sujet est délicat que soient instaurés des états généraux département par département, synthèse régionale et enfin synthèse nationale à présenter au Peuple par la voie référendaire.
Il eût été bien de respecter la nécessité de l'Equilibre et de l'Equité.
Au lieu de cela il n’y a que communication voire gesticulation en infantilisant les citoyens comme s’ils n’étaient que des sots, on assène des fausses vérités.. Oui on vit sans doute plus vieux aujourd'hui, mais qu'en sera-t-il demain ? l’espérance de vie commence à diminuer dans certains pays occidentaux et puis vivre plus vieux oui mais dans quel état de santé et d'autonomie ? en EHPAD ?
Il y a effectivement une discordance entre le public et le privé .. mais l'état a-t-il jamais payé ses cotisations ? comment expliquer que les caisses de retraites du privé soient en excédent alors que dans le public c'est largement déficitaire ?
Notre principe de solidarité est basé sur les cotisations sociales donc sur l'emploi, et notamment sur l’emploi durable (que l’on cesse donc les CDD, soit l’emploi est utile soit il ne l’est pas) garantie de la confiance dans l’avenir et donc permettant la consommation, la croissance et le progrès.
Que n'a-t-on dans le même temps abordé cette question de l'emploi ou alors réfléchir à un autre mode de financement ?
Il y avait eu le rapport Marceau Long dans les années 90 qui évoquait l'idée d'un impôt social.. cela avait été initié par la mise en place de la CSG à l'assiette plus large et touchant aussi les capitaux.
Cette idée portée par le CDS d’alors donc soutenue par les modérés, les centristes même sous un gouvernement dit de gauche (gouvernement Rocard) a été dévoyée de son sens par Balladur et on connait la suite avec la mise en place de la CRDS (cotisation d'une dette déjà payée par les salariés : double peine ?, augmentation de la CSG et des cotisations sociales en même temps !). Les gouvernements successifs sont restés dans cet accroissement du mille-feuille pour assurer "l'avenir des retraites » sans se soucier jamais de cette réalité première !
Avec la baisse progressive des actifs et l'augmentation des "inactifs".. (on est passé d'un rapport de 4 à un peu plus de 1!), il y avait matière à réfléchir et se projeter pour les deux générations à venir.
L'équité doit être de mise et il est bien effectivement que les régimes dits spéciaux soient sur la sellette.. les trains ne sont plus à vapeur, les gaziers n’explosent plus en vol en allumant les lampes à gaz etc… je m’interroge sur le pourquoi de la persistance des régimes spéciaux de la Comédie Française, ou de l’Opéra de Paris !!!
Il est bien qu’il y ait une même règle pour tous. Pourquoi un calcul sur les six derniers mois (on gagne naturellement plus en fin de carrière qu’en début) pour les uns et les vingt-cinq dernières années pour les autres ?
Il est bien également de se projeter sur la qualité du niveau de vie du retraité ! Le calcul peut être fait facilement par chacun d’entre nous. Il existe véritablement une bascule du niveau de vie notamment pour celles et ceux qui n’ont pu s’offrir une assurance spécifique supplémentaire permettant de conserver le niveau de vie en activité.
Il aurait été bien aussi de penser aux carrières particulières des femmes et faire en sorte qu’elles ne soient guère pénalisées par leurs maternités (assurant quand même l’avenir de l’espèce) et ainsi faire en sorte une fois pour toutes (plutôt que de n’en parler que le 8 mars) que à compétence égale le salaire soit égal et ce à tous les niveaux.
On est passé d’une durée de cotisation sous VGE de 37,5 années à 43 années en 2014 (loi Touraine-Rossignol sous Hollande).
L’entrée sur le marché du travail est selon les sources officielles d’aujourd’hui situé entre 22 et 25 ans et pour un travail durable vers 30 ans.
22+43 = ?, 25+43 = ? 30+43 = ? je vous laisse le soin de faire ces gentils calculs.
Ainsi la question du départ à 64 ans n’aurait pas été un point de cristallisation !
On mesure bien là les incompétences de ce gouvernement, incompétences révélées de manière itérative : qui se souvient de la déroute gouvernementale lors de l’irruption du Sars Cov2 (Covid19) dans nos vies ? Il y a bien d’autres exemples révélant cette incompétence et justifiant ainsi le passage en force.
Cela signifie effectivement un abaissement de l’art de la démocratie et une perte des libertés.
Le passage en force est l’apanage des faibles !
La première de ces pertes est effectivement le fait que le politique s’est effacé devant ce qu’on appelle les marchés financiers, la finance comme aimait me le dire Raymond Barre. Ces marchés financiers ne raisonnent que sur un court terme, (allez trois à cinq ans) alors que le politique doit réfléchir sur les deux générations suivantes.
Le premier combat devrait être celui-ci : reprendre le contrôle sur les marchés et ne plus s’y soumettre. C’est le politique qui doit décider et non le financier !
Vaste sujet n’est-ce pas ?
Monsieur Macron a été élu en 2017 par défaut en récupérant au passage Bayrou et son projet d’espoir de 2007, en récupérant les socialistes voyant leur parti séculaire anéanti par la gestion Hollande et Valls. Derrière le président Macron il n’y a rien, nombre de députés de la majorité présidentielle ont été choisis par simple demande mail, sans se soucier des qualités et compétences de ces prétendants à la candidature.
N’est-il pas vrai de dire qu’au Royaume des Aveugles, le Borgne est Roi !
Telle est la réalité de la majorité présidentielle. Comment se projeter sur des questions de société fondamentales sans avoir été formés, instruits du passé, de l’Histoire ?
Le raisonnement n’est qu’à courte vue jusqu’à la prochaine échéance.
J’avais écrit sur mon blog lors de l’élection de 2017 :
« Il y a du Bonaparte chez cet homme-là… pourvu qu’il ne devienne pas Napoléon ! ».
Et bien nous y sommes. Quel gâchis !
Et qui trinque ? Et bien comme d’habitude la classe moyenne, celle qui paie et ne voit rien venir en retour de leurs euros versés, cette classe moyenne dont la bascule vers la précarité est devenue en quelques trente ans très inquiétante.
Mais qui l’évoque ? Cela est une des explications du mouvement spontané des gilets jaunes vite noyauté par d’autres groupes dont le seul intérêt est le démantèlement de notre république et de notre démocratie. Cela a arrangé le président, car devant ce noyautage, nombre de ces gilets jaunes sincères dans leur colère, se sont retirés de ce mouvement. Il a calmé le jeu en proposant le hochet du Grand Débat National auquel ont participé des millions de citoyens mais où est donc la synthèse de toutes ces contributions. ? Et puis il y a eu la pandémie qui a jeté un voile sur cette désespérance.
Mais les mêmes causes ne peuvent provoquer que les mêmes effets et nous le mesurons aujourd’hui.
Mon inquiétude est grande car je mesure les incapacités de ce gouvernement d’y répondre avec justesse.
Nous sommes peut-être à la croisée des chemins avec cette possibilité de la conjonction de toutes les frustrations permettant alors l'expression d'actes de violence inédits.
Oui je suis inquiet et je ne vois pas comment ce gouvernement pourra s’en sortir !
L’une des solutions serait la dissolution de l’assemblée nationale mais on mesure déjà que la réponse ne pourra être une volonté de rassembler le pays vers un dessein et une communauté de destin, mais plutôt un vote de rejet permettant alors l’irruption des extrêmes (situés de chaque part de l’échiquier) dans la gestion de notre Pays.
Idem s’il s’agissait de proposer un référendum, la réponse ne serait pas celle attendue à la question posée, mais une réponse de rejet !
Il y a trop de frustrations, trop d’inquiétudes pour l’avenir proche (la guerre en Ukraine, la crise au proche et moyen orient, le surgissement d’une inflation que je crois permise par les marchés financiers et sur lesquels le politique ne peut rien (j’aurais proposé un blocage des prix sur les produits essentiels comme l’avait fait Raymond Barre lors de la crise pétrolière).
Ces frustrations amènent une désespérance qui comme en 1789 se manifeste par des mouvements sociaux et par une expression de violence inédite.
Le sujet des manifestations n’est plus vraiment celui des retraites mais bien autre chose.
Oui, je suis inquiet car je perçois l’impasse !
Jcj
Lyon ce 25 mars 2023